L’auteur de ce petit ouvrage se prévaut d’être un ancien élève de l’Ecole Normale supérieure. Nous supposons donc qu’on lui a appris le sens de la rigueur au cours de ses années préparatoires en Hypokhâgne et en Khâgne, ces classes dans lesquelles nous avons, nous-même, enseigné.
Ce petit livre se lit très bien, pose forte habilement certaines problématiques : l’engagement ambigu et plus que cynique du chef, encore jeune, du côté du nazisme ; ses souffrances physiques dans les dernières années ; les grandes articulations de sa carrière entre Vienne, Milan Berlin, Salzbourg. En revanche, que d’erreurs factuelles et chronologiques. Quelques exemples parmi d’autres. Karajan n’a jamais rencontré Toscanini à Salzbourg en 1934, celui-ci n’y est venu qu’en 1936 et 37. Karajan n’a pas pu être son assistant : confusion regrettable avec Leinsdorf et le jeune Solti. Il n’a pu approcher Toscanini que pendant quelques minutes de conversation, lors d’une répétition à la Scala, au début des années 50. La fameuse Lucia di Lamermoor avec Maria Callas n’a pas été enregistrée en live à Milan mais à Berlin, par la RIAS, fin 1955. La grande tournée mondiale de l’automne 1959 n’a pas eu lieu avec la Philharmonie de Berlin, mais avec celle de Vienne. C’est cette même Philharmonie de Vienne qui interprétait devant le Pape la Messe du couronnement de Mozart à Saint-Pierre de Rome en juin 1985. Cette confusion constante entre les deux grandes formations berlinoise et viennoise est des plus agaçantes. Nous pourrions souligner bien d’autres erreurs, préjudiciables pour le lecteur. L’auteur cite dans sa bibliographie l’ouvrage très médiocre de Pierre-Jean Rémy. Il a bien tort. Il aurait mieux fait de s’inspirer de la somme particulièrement rigoureuse du musicologue britannique Richard Osborne, non disponible hélas, en français.
Jean-Pierre Pister, Vice-président du CLM