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Deux films furent produits en 1951, à l’occasion du trentième anniversaire de la disparition d’Enrico Caruso. Le premier, aux Etats-Unis, en 35 mm et en Technicolor, The Great Caruso − Le Grand Caruso −, devait connaître un succès international et rendit célèbre un jeune Italo-Américain, Mario Lanza. Le second, en 35 mm, mais en Noir et Blanc, Caruso, Leggenda di una voce − Caruso, La Légende d’une voix, connu aussi sous le titre Le jeune Caruso, sortit six mois plus tard en Italie, mais ne fut distribué à l’étranger que plus d’une année après son rival américain. Il resta plus confidentiel, malgré la présence de Gina Lollobrigida et une bande-son enregistrée par un chanteur d’opéra, déjà connu des scènes internationales, Mario Del Monaco.

Sa carrière

Ce ténor était né le 27 avril 1915, à Florence. Sa mère, sa «première muse », avait une belle voix de soprano, et  son père fut un temps critique musical. Après avoir commencé à étudier le violon, le jeune Mario se fait remarquer par l’ampleur de sa voix quand il chante, à 13 ans et demi, Narcisse de Massenet. Il se consacre alors aux études de chant et aux Beaux-Arts. Lauréat d’un concours, à égalité avec cinq autres concurrents, dont Rina Filippini, soprano qui deviendra son épouse, il devient pensionnaire du Conservatoire de l'Opéra de Rome. Mais il manque de perdre sa voix car son professeur s’obstine à lui faire chanter du Mozart et du Rossini, quand il ne rêve que d’opéra dramatique et des rôles héroïques de Verdi, de Leoncavallo et de Wagner. Un semestre de « rééducation » auprès de son premier maître lui permet de faire ses débuts à Pesaro, en 1939, dans Cavalleria Rusticana, puis l’année suivante, il chante à Milan Madame Butterfly, Traviata, Manon Lescaut. Mobilisé pendant la Seconde Guerre mondiale, il obtient de ses officiers des permissions pour continuer à se produire. Dès 1946, il chante les opéras qui feront sa gloire : André Chénier, avec Renata Tebaldi, Aida à la réouverture des Arènes de Vérone, et Tosca à Covent Garden. En 1947, à Naples, à Rome et à Paris, il aborde Don josé qui restera un de ses rôles fétiches, avec le rôle du ténor dans Fedora de Giordano. Puis c’est l’Amérique du Sud, avec La Fille du Far West de Puccini et le Mefistofele de Boïto. En 1948,quand il chante à la Scala de Milan André Chénier, Umberto Giordano, le conseille en annotant sa partition de sa propre main. En 1949, lors du premier anniversaire de la mort de Giordano, il est choisi, avec Maria Caniglia, Fedora Barbieri et Paolo Silveri, pour une grandiose exécution de l'œuvre, dirigée par Victor de Sabata. La même année, l'Opéra de Rome l'accueille à nouveau pour une série de Carmen, avec la française Denise Scharley.

C’est en 1950, qu’il interprète son premier Otello au Colon de Buenos Aires, rôle qu’il gravera, dès 1954, sous la baguette d’Alberto Erede, puis en 1961, dirigé par Karajan, chez Decca qui lui a signé un contrat d’exclusivité, dans les deux cas avec Renata Tebaldi et Aldo Protti. Il est considéré comme l’un des grands Otello du XXe siècle avec Giovanni Martinelli, Ramon Vinay et Jon Vickers. Notre amie Christiane Stutzmann, de l'Opéra, aura le privilège d'être sa Desdémone à Nice. Del Monaco participe à quatre saisons du Met avec Aïda, Otello, Tosca avec Tebaldi (1955), Norma, avec Maria Callas (1956). Il pourra dire : « J'ai tenu sur les fonts baptismaux du Met aussi bien Callas que Tebaldi. » En 1957, l’Opéra de Vienne et Karajan l’accueillent pour Otello, avec Léonie Rysanek. Ses représentations de Carmen et de Paillasse, en 1959, au Bolchoï, font sensation et il reçoit la grande médaille de l'ordre académique de Lénine. L’enregistrement de Carmen est assez pittoresque puisqu’il chante en italien quand le reste de la distribution chante en russe. La Ville de Paris, à son tour, lui offre sa grande médaille d'argent pour son interprétation de Samson et Dalila, au côté de Denise Scharley, au Palais Garnier, en mai 1960. La même année, il chante Les Troyens, à la Scala de Milan.

Fin 1963, il est victime d’un terrible accident de voiture qui fait craindre le pire. Huit mois plus tard, il rechante à Torre del Lago, dernière demeure de Puccini, Tosca avec le Scarpia de Tito Gobbi. Sa carrière se recentre sur la Scala de Milan et le Metropolitan Opera. Au cours de sa tournée américaine, il chante Samson et Dalila aux côtés de Rita Gorr. Il fait quelques apparitions en Allemagne à partir de 1962 et chante La Walkyrie, à Stuttgart, en 1966. Malgré une voix qui le rapproche du Heldentenor, il ne fut jamais un ténor wagnérien. Il chante en 1973, pour le centenaire de la naissance de Caruso et quitte la scène, après une dernière Tosca à Hambourg, en février 1976. Il apparaît encore dans un film de Dino Risi, Primo amore, en 1978, avec Ugo Tognazzi et Ornella Muti.

Il aurait chanté 427 fois le rôle d'Otello, plus vraisemblablement 218. Dès 1948, son physique avantageux et ses talents de comédien lui permettent de tourner un rôle de ténor, dans un film policier, L'homme aux gants gris. Il participe à des films musicaux, biographies de compositeurs − 1952, une vie de Mascagni, Melodie Immortali ; 1953, Giuseppe Verdi où il incarne Francesco Tamagno, et Tito Gobbi, Victor Maurel −, ou d’artistes : outre le Caruso déjà cité, en 1955, dans La Belle des Belles, il est un des partenaires à la scène de la célèbre soprano Lina Cavalieri que joue Gino Lollobrigida.

Après son retrait de la scène, il a enseigné. Souffrant de troubles néphrologiques, il meurt d’un infarctus, après une longue période de dialyse, en 1982, à 67 ans, au même âge que Beniamino Gigli, vingt-cinq ans plus tôt. Selon sa volonté, Del Monaco a été enterré dans son costume d’Otello, à Pesaro. Son fils, Giancarlo, né en 1945, mène une carrière de metteur en scène lyrique.

Sa place aujourd’hui

Il avait 31 rôles à son répertoire, essentiellement véristes. Aux 25 enregistrements officiels chez Decca, très bons techniquement, il faut ajouter presque autant de prises sur le vif, et une dizaines de vidéos (RAI, Moscou, Tokyo, Berlin), ce qui est rare pour la période concernée. Ces nombreux témoignages discographiques et filmiques, tout à la fois, le servent et le desservent. Il témoigne d’une époque où l’art du chant lyrique opère une mutation. Del Monaco commence sa carrière quand l’opéra vériste règne en maître, quand on a oublié tout un pan de l’œuvre de Verdi, et que la musique Baroque n’est pas encore à la mode. Il se fait connaître alors que l’idole des Italiens, Gigli, à la voix très différente et peut-être d’un style qui peut paraître obsolète aujourd’hui, est en fin de carrière. L’« athlète » Del Monaco séduit immédiatement. Il atteint le sommet de sa gloire dans les décennies 50 et 60, alors que d’autres ténors, Giuseppe Di Stefano, Carlo Bergonzi et Franco Corelli le concurrençaient dans certains rôles (Rigoletto, Tosca, Le Trouvère). Il était intouchable dans Andrea Chénier de Giordano et l'Otello de Verdi, du moins jusqu’à Jon Vickers.

On a reproché à Del Monaco d’être incapable de chanter mezza-voce. Pourtant dirigé par un Karajan, il sait se montrer nuancé. De plus, son ampleur vocale, son engagement scénique passaient certainement mieux sur scène qu’en studio : car, et c’est là sa modernité, il était un comédien-chanteur. Il faut réécouter, sans préjugés, Mario Del Monaco.

Danielle Pister